Piercings
et tatouages
Document de Yasmine Salmandjee
© Groupe Eyrolles, 2003,
ISBN 2-7081-3508-2
Les types de piercings
et leur origine
" Il est difficile de définir précisément et avec une certitude absolue les premières apparitions du piercing. On sait que les Romains « utilisaient » le piercing pour contraindre les esclaves à la chasteté. Les soldats quant à eux, exhibaient fièrement leur piercing au téton, symbole de virilité. Les Esquimaux et les Égyptiens semblent eux aussi avoir pratiqué le piercing (découverte de bijoux en or pour les oreilles). Il existe une référence à l’apadravya, un piercing génital, dans le Kama Sutra (c’est-à-dire aux environs de 700 avant JC), tandis qu’on attribue aux Dayaks de Bornéo un autre piercing similaire, l’ampallang, un apadravya horizontal, en quelque sorte. On retrouve enfin des traces de piercing de la lèvre inférieure en Amérique du Nord et du Sud et en Afrique, mais aussi en Nouvelle-Guinée, en Australie, en Inde et en Indonésie.
Vous l’aurez compris, l’histoire du piercing n’est pas strictement linéaire, car chaque type de piercing — et il en existe un nombre important — a une histoire
différente !
On peut en fait classifier les piercings en familles ou types, selon la partie du corps où est implanté le bijou. Les piercings faciaux concernent le visage, les piercings corporels, comme leur nom l’indique aussi, le reste du corps, à l’exception toutefois des piercings génitaux (masculins et féminins), qui constituent une famille à part entière. Enfin, les piercings de surface ont la caractéristique de traverser une zone plane de peau de part et d’autre et peuvent se pratiquer sur toutes les parties du corps.
À l’exception du piercing de l’arcade sourcilière, que l’on pourrait qualifier de « moderne », quasiment tous les types de piercings existant aujourd’hui ont une histoire. Les origines des différents piercings sont aussi lointaines que différentes les unes des autres ! La pratique est toutefois loin d’être anodine, et très souvent une signification religieuse ou sacrée est associée à l’acte.
Piercings faciaux
La famille des « faciaux » regroupe la multitude de parties du visage pouvant être percées. Elle inclut les piercings du lobe de l’oreille et de la narine, les plus répandus, mais aussi de la bouche (lèvres, langue et pourtour de la bouche), de l’arcade et enfin de nombreuses autres zones de l’oreille (conque, hélix, tragus, etc.) ou du nez (bridge et septum).
Piercing Oreille
Outre le lobe, connu de tous, quasiment toutes les zones de l’oreille peuvent être percées : conque, hélix, lobule, tragus, en particulier. Mais où sont donc situées toutes ces zones aux noms exotiques ? Voici les plus connues des amateurs de piercing :
Piercing du Lobe. Le piercing le plus répandu au monde a une véritable histoire ; siège de croyances et superstitions diverses, il indiquait parfois aussi le statut social élevé de celui qui le portait. Les plus underground, « flesh tunnels » (agrandissement du trou percé dans le lobe pour créer un « tunnel de chair », littéralement), trouvent aussi leur source dans des rituels de tribus sud-américaines et africaines (trous progressivement élargis par le port de bijoux de diamètre croissant).
Piercing Conque. Cavité de l’oreille externe où prend naissance le conduit auditif.
Piercing Hélix. Saillie bordant le pavillon de l’oreille en avant, en haut, puis en arrière, elle est composée de cartilage.
Piercing Tragus. Saillie triangulaire du pavillon de l’oreille, placée en avant du conduit auditif externe. D’autres zones sont indiquées dans l’image ci-après.
Piercing Nez
Comme pour l’oreille, un des piercings du nez est très fortement développé dans le monde entier : le piercing de la narine. Il existe toutefois deux autres zones du nez populaires dans le milieu du piercing : le septum et le bridge.
Piercing Narine. Originaire du Moyen-Orient, ce piercing naît il y a plus de 4000 ans et connaît son plus grand essor en Inde dès le 16e siècle : adopté par les castes élevées, il devient un symbole social. Récupéré par la culture hippie dès les années 1960, il est adopté par le mouvement punk dans les années 1980 et finit par devenir extrêmement populaire dans le reste du monde à la fin du 20e siècle.
Piercing Septum. Effectué dans la cloison centrale du nez, ce piercing existe aussi depuis longtemps : les Papous de Nouvelle-Guinée y portaient un bijou en os ou en bois.
Piercing Bridge. Zone située au-dessus du nez, entre les deux yeux, le bridge peut être également percé.
Piercing Bouche
Les piercing de la bouche ont quasiment toujours existé. Seules les plus hautes castes des Aztèques et des Mayas pouvaient orner leurs lèvres avec des bijoux en or pur. En Afrique, les femmes des tribus Makololo et Malawi portaient des assiettes à leur lèvre supérieure, afin de séduire les hommes de la tribu. Les tribus d’Amérique centrale et du Sud perçaient aussi leurs lèvres inférieures afin d’étirer un trou et y placer une assiette en bois.
Plusieurs zones de la bouche peuvent être percées. Certains endroits portent des noms particuliers :
Piercing Labret (lèvre inférieure). Les Eskimos portaient parfois un bijou en os sous la lèvre inférieure. On retrouve la même pratique chez certaines tribus africaines et amazoniennes mais avec un bijou en bois. On peut placer un anneau ou un labret.
Piercing Madonna ou Monroe. Ce piercing est effectué au-dessus de la lèvre pour donner l’illusion d’une mouche, comme celle des deux célébrités qui ont inspiré ces noms.
Piercing Medusa (lèvre supérieure). Ce piercing est effectué au-dessus de la lèvre, sous le nez. Il est peu répandu.
Piercing Langue. Ce piercing, qui serait inspiré d’un rituel Maya, est effectué verticalement sur le sillon médian et ne peut être pratiqué que sur une langue suffisamment longue, avec un filet peu développé. Le piercing dela langue connaît un fort succès auprès du grand public depuis quelques années.
Piercing Arcade
Ce piercing est en général pratiqué sur la partie inférieure des sourcils, dans l’axe de son choix. Il peut être assimilé à un piercing de surface tant il est difficile de prévoir ou pas un rejet. Il ne peut être effectué sur une arcade plate (le bijou créerait trop de tension sur la peau et entraînerait un rejet).
Piercings corporels
Piercing Nombril
Le nombril est un autre piercing très populaire, surtout auprès des jeunes femmes, depuis quelques années. Ses origines sont très lointaines et ils n’était alors pas seulement un ornement féminin : au temps des civilisations égyptiennes, seul les Pharaons et familles royales ont le droit de percer leur nombril, signe d’un statut social élevé. Cette pratique est introduite bien plus tard dans le monde occidental, à Hawaï, au début de la seconde guerre mondiale. Le bijou est habituellement placé dans la partie supérieure du nombril pourvue d’un repli. Certaines personnes ont un repli situé dans la partie inférieure du nombril, le piercing est alors effectué en bas. D’autres ont un nombril plat, dépourvu de repli : le piercing est impossible.
Piercing Téton
Le piercing du téton est de plus en plus populaire, chez les hommes comme chez les femmes. Son histoire démontre qu’il constitue depuis toujours une preuve de courage (au temps des légionnaires romains), ou un rite de passage à l’âge adulte (tribus d’Amérique centrale). Il devient phénomène de mode auprès des femmes de l’époque victorienne (fin du XIXe siècle). La tendance est de se faire percer les deux mamelons et de les relier par une chaîne en argent.
Aujourd’hui, le piercing au téton devient de plus en plus commun. Il peut être effectué horizontalement ou verticalement (les deux types de piercings pouvant être combinés).
Piercings génitaux
Il existe une quantité impressionnante de piercings génitaux, féminins ou masculins.
F?éminins
Parmi les nombreuses zones de piercings génitaux féminins, citons « le capuchon du clitoris », « le clitoris » (peu pratiqué car il nécessite une morphologie particulière, et peut entraîner une perte de sensibilité s’il est mal réalisé), et « les lèvres » (grandes lèvres ou petites lèvres, ce dernier étant déjà pratiqué chez les esclaves des Romains pour leur éviter d’avoir des rapports sexuels : les deux lèvres percées étaient attachées ensemble).
Masculins
Dans ce domaine, les hommes ont beaucoup plus de choix que les femmes. Il est vrai que beaucoup de pratiques de ce type ont des origines tribales… et que l’anatomie masculine offre plus de latitude ! À titre d’exemple, l’ampallang (piercing rituel qui traverse horizontalement le gland et trouve son origine dans les tribus Dayak de Bornéo), ou l’apadravya (équivalent vertical de l’ampallang d’origine indienne et évoqué dans le Kama Sutra), le frein (ou frenum, pratiqué par les moines pour interdire toute pratique sexuelle, un cadenas remplaçant le bijou), etc. Il en existe des dizaines !
Le plus connu de ce type de piercing est incontestablement le Prince Albert. La légende dit que ce piercing viendrait du mari de la Reine Victoria, le prince Albert, qui portait un anneau au bout du gland passant à travers l’urètre et ressortant à la base du filet.
Piercings de surface
Un piercing de surface est un piercing dont les trous d’entrée et de sortie du bijou sont situés sur un même plan. En d’autres termes, le piercing est effectué à travers une zone plane de peau. Ce type de piercing, parfois qualifié de « piercing extrême », peut s’effectuer sur le front, dans le cou, les bras, la poitrine, le dos ou les jambes, ou encore sur le dos de la main et même le long de la colonne vertébrale ou entre les doigts. Le phénomène connaît depuis peu une véritable explosion.
Les piercings de surface présentent un certain degré de risque, voire de danger, et c’est peut-être ce qui les rend attractifs auprès de certaines personnes.
Ils font en effet partie des piercings les plus longs à cicatriser et sont très souvent rejetés par l’organisme. Le problème de l’introduction d’un tel corps étranger (le bijou) est que le corps humain a de grandes chances de l’interpréter comme un danger et de chercher, plus ou moins rapidement, à s’en débarrasser (exactement comme une écharde).
Il est donc très difficile de conserver un piercing de surface jusqu’à sa cicatrisation et les soins à y apporter après l’intervention sont d’autant plus importants.
Le piercing tel que nous le connaissons aujourd’hui ne s’est bien sûr pas imposé du jour au lendemain, ni sous sa forme primitive, telle qu’elle est présentée ci-dessus. Il se répand dans l’aristocratie du 18e et 19e siècle puis disparaît d’Europe au début du XXe siècle. Il réapparaît à la fin des années 60, sous l’impulsion d’un millionnaire Américain, Doug Malloy. Plus connu sous le nom de Fakir Musafar, il est le fondateur du courant philosophique des Modern Primitives, qui revendiquent la symbolique des modifications corporelles, en général. Certains piercings sont ensuite récupérés par les milieux Hippy, dans les années 60 et 70, puis Punk, dans les années 80.
ouvrage de photographies réalisé par Fakir Musafar.
La réelle popularisation du piercing n’a en fait qu’une quinzaine d’années, et on la doit principalement aux artistes de la scène publique. De la provocante Madonna à la sculpturale Naomi Campbell, du charismatique Lenny Kravitz aux éphémères boys band, en passant bien sûr par l’incomparable Jean-Paul Gaultier, de très nombreuses personnalités de la mode et de la musique ont largement contribué à l’essor du piercing (et pour certains du tatouage aussi) auprès du grand public, depuis les années 90.
En France, le premier studio de piercing ouvre officiellement ses portes à Paris à la fin 1994. Jusqu’alors, seules les villes de Londres ou Amsterdam offraient ce type de service, dans des boutiques ayant pignon sur rue. Depuis, le phénomène s’est très largement développé et les « candidats » au piercing ont désormais un très large choix, qu’il s’agisse de trouver un professionnel compétent ou un bijou adapté à leurs goûts les plus fantaisistes ! ... "
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